24 février 2017

 

Amanda Castillo

 

 

Pourquoi il faut oser la reconversion professionnelle


Bifurquer dans un parcours professionnel, c’est se donner le droit d’être mû et mené par l’aspiration que l’on se reconnaît. Explications


Selon une étude conduite par le prestataire de services en ressources humaines Kelly Services, 40% des hommes et 49% des femmes suisses «auraient finalement préféré embrasser une autre carrière». Une personne sur cinq pense par ailleurs avoir choisi le mauvais métier. Autrement dit, ce que nous savons faire n’est pas toujours ce que nous aimons faire.


La vie, ce jardin aux sentiers qui bifurquent
Fort heureusement, la vie est à l’image du cavalier au jeu d’échecs: elle permet des déplacements non linéaires. Rares sont cependant ceux qui s’autorisent de telles libertés de mouvement sur l’échiquier professionnel et revendiquent le droit à un emploi qui ne soit pas étranger à leurs passions et aspirations. La grande majorité d’entre nous reste en effet fidèle au choix de carrière effectué à la fin de la scolarité post-obligatoire. Les raisons à cela sont complexes et variées: peur de sortir de sa zone de confort, peur de perdre trop d’énergie à se former à un nouvel emploi, peur du jugement de l’entourage, étant précisé que la décision de la bifurcation a souvent besoin de l’adhésion des proches pour être menée à terme, ou encore peur de l’incompréhension des recruteurs

 

Pourtant, les arguments qui plaident en faveur d’un changement de trajectoire professionnelle sont multiples. D’une part, effectuer un choix c’est avoir des connaissances sur soi et sur le monde. Or opter pour une profession au cours des études secondaires (15 à 19 ans) – soit à un âge où l’on ne se connaît pas encore soi-même – ne permet pas d’expérimenter ses choix de vie, de prendre des initiatives et plus généralement de faire l’expérience de l’erreur.


D’autre part, les transformations dans le monde du travail et dans le rapport au savoir conduisent souvent à la nécessité d’apprendre à «inventer sa vie», chemin faisant. Une reconversion professionnelle peut par conséquent être une manière intelligente d’anticiper le futur ou de se donner une nouvelle chance. Comme le souligne le psychologue humaniste Carl Rogers, de nos jours, «le seul individu formé, c’est celui qui a appris comment apprendre, comment s’adapter, comment changer, c’est celui qui a saisi qu’aucune connaissance n’est certaine et que seule la capacité d’acquérir des connaissances peut conduire à une sécurité fondée». Gaston Berger, inventeur de la Prospective, ajoute que «l’un des caractères de l’époque dans laquelle nous entrons, c’est que nous avons affaire à des problèmes dont les données changent au moment où, croyant avoir achevé de les connaître, nous entreprenons la recherche des solutions.» Apprendre à vivre dans un monde mobile est ainsi devenu une nécessité.


Le changement, le sel de la vie
Donner un tournant à sa carrière peut enfin éviter une usure ou un désenchantement. André Gide explique ainsi qu’une bifurcation, c’est lorsqu’il «découvrai(t) soudain un nouvel orient à (s)a vie». Dans son récit de vie, l’ethnologue Françoise Héritier raconte ce qu’est une rupture professionnelle adossée à une décision volontaire dans un itinéraire de vie: «J’avais envie de faire de l’ethnologie… Je voulais changer radicalement. Une opportunité se présentait et je l’ai saisie sur une impulsion. C’est toujours comme cela que j’ai agi dans mon existence… Pour être content de soi, il faut oser et y aller!»


Rappelons enfin les paroles de sagesse du philosophe Danois Soren Kierkegaard: «Si je devais me souhaiter quelque chose, je ne me souhaiterais ni la richesse ni le pouvoir, mais le sens passionné du devenir, tout ce qui importe, qui pétille, qui embaume, qui stimule comme possibilité. Il n’est de fidélité au passé que dans l’avenir.»

 

Visualiser la journée de travail idéale
Reste la question de savoir comment réussir sa reconversion professionnelle. Dans «Carrière sur mesure» (Ed. Maxima), un livre didactique dont l’objectif est d’aider le lecteur à affronter le changement et les angoisses qu’il génère, Isabelle Flouck, spécialiste en évolution de carrière et consultante RH, propose plusieurs pistes. L’imagination, dit-elle, est un outil de pensée essentiel qui nous aide à grandir. Elle ne sert pas exclusivement à s’évader, mais permet aussi à l’être humain de s’adapter au monde et de prendre possession de lui.


Aux travailleurs insatisfaits ou désenchantés qui n’osent pas le changement, elle conseille de visualiser la journée de travail idéale par le biais d’une fresque-collage ou d’un roman-photo. Cet exercice simple qui consiste à sélectionner plusieurs images inspirantes, à les imprimer puis à les réunir sur un support, permet de donner un input clair et visuel à notre cerveau de ce que l’on souhaite explorer, résoudre ou atteindre. En effet, de nombreux individus ne parviennent pas à se mettre en mouvement parce qu’ils ont une image trop vague de ce à quoi devrait ressembler l’emploi idéal. Un projet, l’emploi rêvé, peuvent être comparés à un gigantesque puzzle. Il est beaucoup plus simple de l’assembler en ayant sous les yeux l’image de ce qu’il représente.


Le journal de bord
Autre exercice pour entreprendre le changement: la tenue d’un journal de bord. «Consignez-y tout le cheminement de votre réflexion, mais aussi vos aspirations, vos découvertes, vos doutes, vos manques et vos difficultés, dit Isabelle Flouck. Ce journal sera un encouragement à vos efforts et vous permettra de mesurer les progrès.» A cet égard, les listes constituent de puissants outils de visualisation. «Listez les activités qui vous font vibrer. Enumérez précisément les qualités de votre travail idéal: quel serait votre revenu? Combien d’heures par semaine travaillez-vous? Etes-vous salarié ou indépendant? Etes-vous dans un bureau, chez vous ou sur le terrain? Imaginez les personnes avec lesquelles vous interagissez. Quel est le service ou le produit que vous avez à leur offrir? Plus vous serez précis, clair, et spécifique, plus vite vous évoluerez vers ce à quoi vous aspirez.»


A noter qu’Isabelle Flouck donnera un atelier le 3 mars prochain chez Payot à Nyon sur les techniques créatives de la reconversion et de l’élaboration du projet professionnel. Au programme, collages, Mind Map, Post-itorama et autres exercices permettant de visualiser ses rêves professionnels. Isabelle Flouck propose également un service de coaching en ligne ainsi que des séances de travail en entretien individuel.

 

Pour plus d’informations, consultez le lien suivant: www.ifcarriere.com